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L’ESS comme vecteur d’émancipation des jeunes

Par Marie Vabre

Les tarifs des études qui augmentent chaque année, ajoutés aux frais de logement, pèsent un poids croissant dans le budget des parents ou des jeunes qui peinent à devenir indépendants. Cet article a été écrit pour le compte du think tank, Le Labo de l’ESS.

Selon une étude de l’Union nationale des étudiants de France (Unef), publiée en août 2016 : « Pour la rentrée 2016, le coût de la vie augmente de 1,23 % soit près d’un point de plus que l’inflation ». Si l’Unef a obtenu des mesures de protection comme le gel des tarifs obligatoires (frais d’inscription, restaurant universitaire, Sécurité sociale, NDLR) ou l’augmentation des bourses, « cela ne permet que de ralentir l’augmentation du coût de la vie pour les étudiants », estime-t-elle. La moitié des étudiants est ainsi obligée de cumuler job et études. C’est pourquoi ils sont de plus en plus nombreux à se tourner vers l’emprunt. Ils seraient environ 300 000 à avoir eu recours à un prêt étudiant (soit 12% d’entre eux) pour une moyenne de 10000€ (Source : OVE et Monéo). Mais l’un des principaux freins demeure de garantir à la banque, une caution parentale solide.

StudyLink.fr est la première plateforme de prêts étudiants entre particulier qui aide les jeunes à payer leurs études grâce au financement participatif. A mi-chemin entre le réseau social et le crowdfunding, le site permet à toute personne en formation (initiale ou continue) de solliciter un prêt avec ou sans intérêt, que ce soit via une communauté constituée dans son entourage ou auprès d’investisseurs, comme des réseaux d’alumni, par exemple. « Pour nos prêteurs, le but n’est pas de s’enrichir sur le dos d’un étudiant mais de faire un placement d’argent qui ait du sens, en offrant de meilleures chances de réussites à son emprunteur ». Pour ce projet ambitieux, les deux co-fondateurs, eux-mêmes anciens étudiants confrontés à cette question, ont choisi de créer une plateforme “fintech“ 100% Made in France : le siège de StudyLink est basé à Grenoble ; le prestataire de services et de paiement est situé à Paris, tout comme l’hébergeur de la plateforme, tandis que les données se trouvent dans un datacenter à Roubaix.

Ces problématiques de financement participent à creuser un peu plus les inégalités sociales, et pour certains, la précarité déjà existante. Les difficultés sont d’autant plus grandes quand les questions de santé et de handicap entrent en jeu et, l’économie sociale et solidaire a toute sa place sur cette question.

Par exemple la Fondation Santé des Étudiants de France (FSEF) qui s’est donnée pour mission essentielle de permettre à des jeunes malades de poursuivre efficacement leur scolarité et leurs études, tout en bénéficiant de soins médicaux adaptés. Chaque année plus de 5 000 nouveaux jeunes patients de 12 à 25 ans sont pris en charge.

Cette organisation est elle-même présidée par un étudiant, Romain Boix et regroupe 12 établissements sanitaires et 11 structures médico-sociales. Dans chaque clinique est intégrée un service des études. En 2015, la dimension éducative a été renforcée par la signature d’une nouvelle convention avec le ministère de l’Education nationale.

La Fondation développe également une offre de résidences pour étudiants en situation de handicap (Grenoble, Nanterre, Paris). Parmi les projets en cours, une nouvelle résidence adaptée en plein cœur du réseau universitaire parisien et de nouveaux relais-étudiants-lycéens en lien avec les universités (notamment pour proposer des consultations psychiatriques, une aide psychologique ou un accompagnement psychopédagogique).

Et pour les jeunes qui sont de plus en plus nombreux à se tourner vers des carrières porteuses de sens, non seulement les occasions d’engagement citoyen ne manquent pas, en cours de cursus, mais les formations spécialisées en économie sociale & solidaire se multiplient. Le Service Civique est devenu un dispositif emblématique : un engagement volontaire de 6 à 12 mois, au service de l’intérêt général, ouvert à tous les jeunes de 16 à 25 ans, sans condition de diplôme. Les associations et les collectivités locales, ainsi que divers secteurs d’action d’intérêt général, tels que les sapeurs-pompiers, sont les principaux organismes et secteurs d’accueil.

Afin de favoriser l’engagement des jeunes par le biais du développement de la vie associative, plusieurs réseaux coexistent sur les campus dans toute la France. Le réseau Animafac regroupe plus de 4 000 associations sur les territoires et accompagne les bénévoles étudiants dans la réalisation de leurs projets. Fac Initiatives est une autre réseau d’associations, créé par un collectif d’étudiants. Il permet ainsi l’échange de bonnes pratiques et la mutualisation entre associations. Pour le moment, il fédère des initiatives en région parisienne, à Toulouse, Marseille, Bordeaux et devrait continuer à s’étendre. Fac In’ fait partie de la coopérative Solidarité Étudiante(SE).

Pour créer une mobilisation de la jeunesse en faveur d’une économie alternative, vectrice de transformation sociale et faire découvrir des moyens d’actions porteurs de valeurs, SE a lancé la Semaine Étudiante pour l’Économie Sociale et Solidaire qui sera reconduite pour la 3ème année consécutive. Elle est rapidement devenue le « temps jeune du Mois de l’ESS », rassemblant le monde universitaire et des acteurs spécialisés. Ouverte, elle permet à chacun de pouvoir participer, en tant qu’organisateur ou en simple spectateur. Cette semaine appartient à toutes celles et ceux qui souhaitent organiser des événements en direction des jeunes, tant qu’ils visent à promouvoir l’ESS.

Pour faire connaître les filières d’enseignement de l’ESS, la Conférence des présidents d’université (CPU) a lancé, en juin 2015, le premier guide : « Université et Économie sociale et solidaire », en partenariat avec le Crédit Coopératif. Il existe désormais plus de 70 formations universitaires sur l’ESS, des Licences et des Masters pour la plupart. Ces diplômes proposent souvent de compléter les socles généralistes (management, gestion, communication…) par des enseignements adaptés aux spécificités du secteur, avec des zooms sur les fonctionnements particuliers de ses structures et son histoire. Une carte interactive a également été réalisée par le journal La Croix à partir de données du Conseil National des Chambres Régionales de l’Économie Sociale et Solidaire sur les formations universitaires.

Fait remarquable, d’après une étude conjointe entre Ipsos, le Boston Consulting Group et la Conférences des Grandes écoles, dévoilée en janvier 2016, un étudiant sur deux de grandes écoles souhaiterait exercer une activité dans l’ESS. Cependant, 54% d’entre eux admettent ne savoir que « vaguement » ce que désigne cette expression. Pourtant, les 21 secteurs professionnels de l’ESS continuent à recruter malgré la crise : Habitat social, petite enfance, animation, aide à domicile, sport… Il faut savoir que les employeurs de l’ESS sont à la recherche de compétences avant tout, de savoir-être et savoir-faire car ils ont souvent besoin de postes transverses : services supports, RH, comptabilité, informatique, téléconseil…

Comme le soulignait Martine Pinville, Secrétaire d’Etat à l’Economie sociale et solidaire, dans une interview accordée à La Tribune, « le secteur souffre d’un déficit de notoriété ». La communication continue donc de représenter un axe de développement important pour permettre de poursuivre la reconnaissance et la structuration de l’ESS.

Retrouvez le dossier complet Etudiants & ESS, sur le site du Labo de l’ESS.